Revêtement, ravalement de façades ou massacre
urbanistique ?
L’hôtel El Marsa, un joyau de l’hôtellerie datant de
l’époque de Boumédienne, qui a résisté aux séismes et aux vents marins depuis
1973 est en train d’être démoli.
A coups de marteau et de burin, les travailleurs des
sociétés françaises de réhabilitation progressent. Après El Minzah, Er-Riad,
c’est le tour d’El Marsa ; puis ce sera le tour d’El Manar, après l’avoir
vidé de ses derniers journalistes, qui s’y trainent encore comme dans un chalet
pour soldats.
L'opération de réhabilitation de l'hôtel El Marsa avance
vite et prend des airs d’opération de destruction. Tous les revêtements muraux
en ciment, plâtre, marbre et faïence ont été décapés au marteau-piqueur pour être
remplacés .... par du placoplatre. Les revêtements de sol en marbre ont été
enlevés au marteau-piqueur pour être remplacés, sans que leur état l’exige.
Pareil pour le revêtement de la piscine en bon état va être détruit.
La réhabilitation de la chaine d’hôtels de Sidi
Fredj coutera à l’Etat des milliards de dinars dans un contexte de récession
économique et de tarissement des rentrés en devises. Les bureaux d’études
français qui ont le marché en main, complètent les entreprises émiratis déjà
surplace depuis cinq ans, et qui sont chargés d’y construire un complexe
hôtelier futuriste.
Ces travaux rendent invivable l’accès des familles
au port de Sidi Fredj, un des rares
endroits pris d’assaut les week-ends.
Les eaux usées, nauséabondes, avant d’arriver à Erriad, inondent la route épisodiquement.
On ne vous conseillera pas de visiter la suite des
hôtels de Sidi Fredj ces jours-ci. Pour les nostalgiques des belles années de
Sidi Fredj, il s’agira d’une agression caractérisée contre ce que furent les
joyaux de l’hôtellerie sous Boumediene. El Manar, le plus imposant, devient triste,
crasseux, un véritable nid de prostituées à 500 dinars. El Minzah a été rattaché
à la concession hôtelière faite aux Emiratis. Erriad, cédé en concession à un
homme d’affaires libanais, se transforme en maison de jeunes ou de loisirs, et
perd sa vocation de site touristique classé 4 étoiles. Ses uniques rentrées
d’argent consistent en la location de la grande salle de conférence louée
épisodiquement et de manière aléatoire, pour les meetings des partis politiques
ou pour maquignons accompagnés de prostituées de la petite semaine.
Au final, c’est plus que lamentable, ce résultat
auquel sont arrivés ces hôtels de luxe devenus simples dortoirs pour autochtones
et locaux, n’attirant pratiquement plus les étrangers, comme par le passé.
Un bijou datant des années 1970
Le complexe hôtelier de Sidi Fredj est situé à
l'Ouest de la ville d'Alger sur la presqu'île, dans la commune de Staouali. Le
complexe, dont l’architecture et la décoration ont été l’œuvre du célèbre
architecte français Pouillon, avait été un joyau touristique sous Houari
Boumediene, et attirait dans les années 1970 et 1980 une large gamme d’hommes
d’affaires, d’étrangers et de nantis en proposant plusieurs hôtels : Hôtel El
Riadh, El Marsa, El Minzah, El Manar, Club Azur et le Centre touristique, tous
dotés de jardins, de salons et de plages de très bonne qualité touristique. Les
Libanais sont toujours les maitres des lieux à Riad Sidi Fredj, mais leur
cahier de charges est loin d’être respecté, entrainant les gens et les
habitants de la périphérie dans des conjectures interminables.
En 2016, après l’achat pour un délai fixe, le
Libanais, appelé « George » par son personnel, a donné près de 70 millions
à chacun des employés algériens de l’hôtel afin de circonscrire la contestation
qui commençait à monter et faire taire le syndicat qui commençait à élever le
ton. Comme il se fait généralement au Liban, le nouveau maitre des lieux à fait
construire une discothèque à l’intérieur et vit de manière cossue avec ses
recettes…
A coté, El Minzah, qui a abritait des centaines de
journalistes, dont des patrons de presse, disparait du paysage. Vers 2008, le
groupe émirati Emaar devait prendre en charge les nouvelles constructions, qui
préfiguraient un méga-complexe futuriste. Introduits par le président
Bouteflika, les Emiratis n’ont pas investi en force.
Le groupe immobilier émirien Emaar a présenté au
Président Bouteflika en 2007-2008 cinq grands projets devant radicalement
changer la face d'Alger et ses environs, pour les doter d'un ensemble unique
d'installations commerciales, de restauration et de loisirs.
Au bout de quelques années de court-circuitage de
sous-sol (les Emiratis invoquaient des entraves financières, alors qu’ils
avaient pu bénéficier de centaines de milliards de dinars de prêts bancaires),
les Emiratis rompent le contrat et annoncent leur fin de mission.
Elles sont très belles, les
maquettes !
En fait, l'affaire de la promotion immobilière
émiratie Emiral n'a pas révélé tous ses secrets et continue de provoquer la
polémique dans les milieux avertis et dans les milieux d'affaires, aussi
bien nationaux qu’étranger. Le prix
dérisoire payé par Emiral pour acquérir des terrains à forte valeur vénale près
de Morreti, la banlieue la plus florissante de la capitale, pose problème. «Les
Emiratis ont acquis entre 6 et 8 hectares pour un prix dérisoire», à
« 1000 DA le mètre carré », disent nos sources. On reste également
sans information concernant la surface totale acquise par Emiral pour lancer
ses projets. L’acte de propriété mentionne 12 hectares.
Emiral, qui a lancé son projet immobilier fin 2007,
prévoit de construire des appartements haut standing près de Morreti. Le prix
prévisionnel du mètre carré de l'appartement aurait été fixé à 440.000 dinars.
Emiral a exigé des demandeurs de déposer une caution d'au moins 3 millions de
dinars auprès de Fransabank, une banque à capitaux arabes.
Des projets jamais réalisés
Les projets que les patrons d’Emral proposaient
concernaient la restructuration et le développement des infrastructures de la
nouvelle gare ferroviaire Agha , destinée à accueillir plus de 80.000 passagers
par jour, la baie d'Alger et le front de mer de la capitale, la construction
d'un complexe de remise en forme pour la ville d'Alger, qualifié par les
concepteurs du projet de « cité du bien-être», l'implantation d'un campus
technologique à Sidi Abdellah, d'une superficie de 90 hectares, qui comprendra
des centres commerciaux, des zones résidentielles aux appartements de grand
standing et un parcours de golf le long duquel seront construits des villas et
des hôtels, et enfin, le complexe touristique Colonel Abbès.
Mon journal du 29/06/2017